21è Siècle (2025)

21è Siècle (2025)

21è Siècle

Publié sur internet, août 2025.

La fin s’infiltre,
elle ne crie pas,
elle file la maille à rebours,
défait les gestes, les visages,
les certitudes rangées dans l’armoire.

 

C’est un détricotage patient,
une pulsion en noir
qui glisse entre nos doigts,
sape les bords du tissu,
ouvre des trous de silence.

 

Parfois vous la supportez,
parce qu’il y aura — croyez-vous —
un autre métier à remonter,
un fil neuf pour relier les morceaux,
un recommencement plus clair.

 

Mais si l’après ne vient pas ?
Si le fil se perd au milieu du vide ?
Alors c’est le poids pur de la perte,
sans retour ni reprise,
qui écrase,
et vous livre au néant
sans couture possible.

 

Chaque perte a ce parfum d’apocalypse :
l’inconscient le sait,
chaque détachement est une fin du monde
miniature.

 

Mais cette fois, écoutez :
le monde lui-même peut s’effondrer,
au-delà de l’érotique,
au-delà du mental,
dans la matière nue
d’une disparition sans témoin.

 

Alors se creuse en vous un état particulier,
un seuil,
ni vie ni mort,
où vous demeurez suspendu·e·s
au fil qui se défait.

 

Vous qui voulez savoir,
vous qui devez savoir
— par chance ou par malheur —
vous habitez ce lieu comme une clairière
où l’air manque et surabonde tout à la fois.

 

C’est un vertige lucide :
vos corps sentent qu’ils tombent,
vos pensées savent qu’elles brûlent,
et pourtant votre désir s’accroche,
non pour sauver,
mais pour voir.

 

Savoir côté désir,
c’est laisser venir la fin
comme on accueille une énigme,
sans garantie de recommencement.

 

C’est consentir au noir,
non par goût du néant
mais par fidélité au réel.

 

Et dans ce séjour impossible,
là où vous êtes écrasé·e·s et relevé·e·s tout ensemble,
s’ouvre une clairvoyance nue,
un savoir qui ne protège pas,
mais qui donne forme
à l’attente sans promesse.